Louise II le retour (6)
épisode 6 : ultima necat
Louise matait la note manuscrite à s’en faire péter les globes oculaires.
Sur le bout de papier était tracé une espèce de damier, mais de trois cases sur huit. Dans trois des cases on avait dessiné une croix. (bon, j’vais vous faire un dessin, sinon, j’vais mettre trois paragraphes d’explications…)
Louise retourna le papelard dans tous les sens, sans comprendre à quoi ce truc pouvait servir, ou ce qu’il était censé indiquer. Finalement, elle le jeta sur la table. Il suffisait d’attendre. Pendant la réception, elle aurait bien une illumination. Elle s’alluma une clope en regardant son aspirine se dissoudre : peut-être qu’un jour, quand elle serait très vieille, elle aurait une clope électronique et plus jamais mal à la tête.
Louise monta dans sa chambre, déposa sur le lit sa tenue de soirée. Croqua un doliprane. Prit une douche. Avala un Ibuprofène. Se lima deux ongles. Alluma une clope. Dix heures. Il était dix heures, ptain, QUE dix heures.
« Et si j’allais faire une rando ? » Car Louise ne ratait jamais l’occasion d’aller carapater dans la campagne : c’était quand même chouette d’enfiler des grolles énormes, et d’enfourner dans un sac à dos des trucs indispensables, genre ; un sandwich au jambon, un gobelet, une minuscule bouteille de pinard, du fromage qui pue, une pêche trop mûre, une moyenne bouteille d’eau, un réchaud, du café en poudre, une boussole, plein de cartes IGN, des pansements, de l’anti-venin, une machette, une balise argos.
Le choix de Louise se porta immédiatement sur le sud de l’Indre. Le sud de l’Indre est au nord de la Creuse. (et inversement). Comme on peut le constater, le sud de l’Indre est tout de même fort différent du nord de la Creuse.
Louise marchait donc, longeant un adorable cours d’eau en sous-bois. Il se produisit au bout de quarante-cinq minutes ce qui se produisait chaque fois depuis quelques mois : elle se rendait compte qu’elle marchait devant pour une fois. C’était étonnant, parce que d’habitude Dominique était toujours devant. Dominique était même cette fois, loin derrière, car quand elle se retournait, il n’était pas là.
Louise avait fait quelques randos cette année : avec la Marquise Fabi, avec le petit Prince Rémi, l’archi-duchesse Nath’ et Consort, avec la princesse Anne et même le Grand-Duc Pierre, qui avait accepté de mettre des chaussures adaptées à la marche pour ce faire. Dominique ne les avait pas accompagnés, c’était normal.
Mais là, quelque chose clochait. Louise marchait donc en tête, babillant malgré tout avec Dominique lorsqu’elle sentait qu’il l’avait rejointe, et elle se mettait à lui parler de toutes les randonnées qu’ils avaient faites. Et à parler de tous ces kilomètres effectués ensemble, Louise avait l’impression de les refaire, et c’était épuisant et bizarre. Tous ces chemins, ces cours d’eau franchis, ces piques-niques, ces côtes et ces descentes.
Dominique ne disait rien.
D’ailleurs, il n’avait rien bu. Il n’avait rien mangé mangé non plus. Du coup, Louise avait mangé le second sandwich et picolé à sa place.
Louise randonnait donc seule, sans être seule. Dominique était là, sans être là.
Et puis à un moment, elle était vraiment seule, mais elle avait beau pleurer et supplier, Dominique ne revenait pas.
(à suivre)